Séance 65

Toile : Ad Reinhardt, Numéro 119, Noir, 1958




Je travaillais à l'entresol de mon esprit et me questionnait sans cesse à propos d'une pseudo supposée identité des faits de ma conscience. J'observais les strates de ma folie comme un ethnologue en plein désert et de mes perceptions mêlées à mes fantasmes je perdais jusqu'à la perception de ce qui devait être moi et ce qui devait être l'autre. Tour à tour en plein désarroi interne, j'écartelais mes perceptions de mes fantasmes et au creux de mon propre clivage j'avais pour la santé mentale, une vraie passion envieuse, souffrante et cachée.

Fleurs explosives

Peinture : Le Tintoret, La Découverte du corps de Saint Marc, vers 1562




J'éclairais malgré moi
Les vociférations de ma mélancolie
Comme l'on déterre les os de sa vérité
J'aimais l'autre coté
Je me baignais dans le doute
Comme une parabole déformante
J'étais les années avariées
Les sombres affalements de la soumission

Et pendant ce temps,
On s'offrait des chiens,
De vieux livres déchirés,
Des parfums d'inéluctable,
Epidémie d'un hiver

Traquant la douleur
Comme le désert se ranime
Je monnayais mes journées
Comme une pute explore
Ses supplices

Un jour en fables divines
L'autre en ami personnel de satan.

Dérisoire Irrigation

Toile : Edgard Jean-Baptiste, Assassinat





Je répandais en moi
Des connaissances
Comme une herbe reprend courage
Après une fumure
J'installais au coeur de mes propres carcasses
Le ventre alchimique
D'un orage en goudron
Ma sylvestre intériorité
Comme une éraflure
Aux yeux paumés
d'aveugles ignorés.

Sanglots d'hiver

Photo : Vladimir Longauer, 2000





Tant de croix en moi
A longueur d'une déclinaison
Les mains jointes
Aux vertiges de mes désespérances
J'irais éponger
Les larmes
De mes vertiges.

Surface de poussière

Photo : Peter Lik, Solitude, 2005




Le givre
En moi
Qui me dessinait
Des poignées de chaume,
Frissons en moi,
Fureurs et murmures
Tenter de décaler,
Une discrète
Traversée.

Branches de peines

Toile : Piero Di Cosimo, Andromède délivrée par Persée, 1510




J'ai entendu
les pas d'un oiseau
Comme une certitude
Sur ma mémoire
Comme un jardin
Sur mon ombre

Marche d'âme

Peinture : Thomas Cole, Lake with Dead Trees, 1825




Le feu du silence
En cendres sur les choses
Refuser les multiples de l'étoile
Un roc d'ombre
Palpite en moi
Comme une arme incertaine.

Hiver fauve

Toile : James Ensor, La Mort et les masques, 1897




En attendant
je rouillais sur des carcasses,
irriguant la vie et la mort
d'une égale épaisseur,
je répandais mes douleurs orageuses
dans une fin de semaine
aussi alchimique qu'un arbre abattu.

Dehors en feux

Photo : Kief in winter, aqua_snezhok




Comme l'été où le froid de l'hiver passe
j'ai croisé une déchirure
à même le vent.
Aux sommets brutaux,
j'ai décliné les pourtours de la grisaille
Suspendu au halo d'une petite embrasure,
j'ai en moi des papiers éclatés.
Défiguré par le froid,
je départage l'espoir du renoncement.

Lampe de pierre

Toile : Ivan Aïvazovski, La Neuvième Vague, 1889




L'étendue qui me déserte
L'inaccessible comme mon souffle
J'effleure l'air
D'une secousse éteinte.

La lisière

Peinture : Wols, 1946




Limbes de l'enfance
De jouets vivants
en couleurs absorbées
J'apprend la candeur
Fragile fraîcheur perdue
Ne me reste plus,
qu'à éclore de ces éclats perdus
Seules issues à cette existence difforme.

Miasmes paradisiaques

Lumineuse évocation
Comme un épieu
Cendre de ciel,
atteinte,
Au plus juste du regret,
galoper vers l'houri,
tropique désir
à jamais fantasmé.

Echoué

Peinture : Jérôme Bosch, Le Jugement Dernier, 1504




Arrière Numidie !
Senteur suave
Moirure des étoffes
J'hume et j'entrecroise
la fuite du temps.
Dans tes élégies,
tu gîte
Solitaire plénitude
Mes sanglots
sont comme le vent.

Souffle courbe

Torture,
Abondance des aboutissements
L'insupportable jouait
à me déserter
Dans une abandonnique lâcheté.