jeudi 3 novembre 2011

Ruine cruelle
















Photographie : Guy Tillim, Mozambique, 2008




Le soir venu, je réactivais une note de Cioran datant de 1957 qui écrivait : " Le fond du désespoir est le doute sur soi" et j'avais bien, de nouveau les attaques du déchirement interne comme une physiologie du chaos psychique.
Comme lui, en date du 24 février 1958, j'avais épuisé ma capacité de me consoler des obsessions noires et je voguais entre projets chimériques et une puissante théologie du néant.
Je subissais le travail négateur du temps dans un sentiment d'étrangeté que même le puissant olanzapine n'arrivait plus à juguler.
Au cœur de mes idéaux médiocres je sauvais les apparences, le cheveux devenu blond et la cigarette droite.
J'aurais voulu appartenir à un groupe séduisant et révélant mais je perdais en moi corrélativement tous les cadavres d'une idéalisation quelconque.
J'absorbais alors par le fond, la massivité de la désintégration et demeurait définitivement prostré dans une liberté vide qu'elle même je m'injectais à haute dose.
Le 9 avril 1962, Cioran écrivait que " la folie n'est peut être qu'un chagrin qui n'évolue plus" et j'en restais là de cette incomplétude.
L'irréelle Alexandra me sortait alors de ses contours culturels, un vieux NRF et j'y lisais :

"Tout était là – bien qu’il n’y eût plus de comptable pour dresser l’inventaire de ses éléments – mais le royaume originel et réellement non reproductible avait disparu à jamais, il avait été broyé par la force infinie d’un chaos qui recelait les cristaux de l’ordre, brisé par la circulation irréductible et indifférente qui gouvernait l’univers."

László Krasznahorkai, La mélancolie de la résistance.
psychiatrie schizophrénie



Ma crucifixion spirituelle était bien celle du réel, déchirant et sourd.